- Fabrice Hadjadj, Et les violents s’en emparent, Les provinciales, 1999, 208 pages, 110 F
L’Évangile violente l’âme. Il la secoue de la torpeur du monde, la déracine du péché, l’arrache à la paresse. Dieu tance ceux qu’Il aime, et Son active charité ne les laisse pas tranquille. Sa violence culmine dans le pardon, qui désarme l’offenseur et retourne contre lui sa malveillance. La douceur évangélique n’est pas celle de la facilité ni du compromis, mais celle du Royaume et de la compassion. Exit le Jésus mièvre qui flagorne le pécheur !
Fabrice Hadjadj joue volontiers des mots et s’amuse à l’humour. Avec sa langue imagée, un peu carabine, il dresse le tableau magnifique des exigences et des joies de la vie chrétienne, et dénonce satisfactions et flatteries. Il piste la bassesse qu’il expose au pilori et traque les instants de grâce auxquels il rend la lumière que le monde leur refuse. Sa voix tonne et panse, brûle et apaise, jette la clarté et dévoile la ténèbre.
Plus qu’à un exercice de style, l’auteur se livre à un exercice spirituel, de conversion personnelle. Le premier qu’il engage, c’est lui-même, son âme. Sa vie est tenue par la vérité qu’il dit. Il le sait et s’y adonne d’autant plus. « Plus la lumière en nous se lève, plus le péché nous apparaît, et plus ce serait faute grave, voire damnante, que de ne pas chercher à l’éradiquer. »
Depuis l’après-guerre, les prétendants à la succession de Bloy et de Bernanos n’ont pas manqué, ni les imposteurs. L’avenir seul dira si Fabrice Hadjadj aura su reprendre la flamme. S’il n’a ni la langue magnifique de Bloy, ni l’étonnante limpidité de Bernanos, il écrit avec bonne humeur. Fabrice Hadjadj est un chrétien heureux. Puissent son bonheur, sa hauteur, sa compassion se répandre par contagion à ses lecteurs !
Guillaume de Lacoste Lareymondie